Dans la Bascule se Trouve le Confort
- "Drriiiiinnng"
- Atelier Titane, bonjour !
- Bonjour, je vous contacte car je cherche un vélo confortable. Et on m’a dit que le titane était confortable.
- … Alors. Bon. Par où commencer… Vous avez un peu de temps ?
À chaque appel téléphonique (ou presque), j’ai deux choix : conforter le client dans ses idées préconçues (oui Monsieur, le titane c’est magique, confortable et léger) ou déconstruire ses croyances en expliquant que la recherche du confort à vélo, élément essentiel et préalable à toute autre chose, est un travail et une quête presque infinie.
La Recherche du Confort
Pour trouver le confort, il faut d'abord le définir. Si on parlait de voitures, on évoquerait le silence, le confort des sièges, la régulation de la température et la filtration des vibrations du moteur et de la route. À vélo, c’est plus simple : c’est essentiellement la qualité des appuis sur la selle, le guidon et les pédales qui constitue le confort. Oui, il y a aussi la filtration des vibrations de la route, mais ceux qui en parlent sont généralement ceux qui ont déjà mal partout et surtout au fessier. Leur sensibilité se compare alors a celle d’un fakir sur sa planche, ressentant de manière vivace et pénétrante toutes les aspérités de la route. L'objectif n'étant pas d'être un fakir sur son vélo, intéressons nous à la position.
L'Importance de la Bascule.
Par bascule on fait référence à la différence de hauteur entre le haut de la selle et le haut du guidon. La bascule est positive si la selle est plus haute, négative si le cintre est plus haut.
Beaucoup de cyclistes, initialement bipèdes, pensent instinctivement qu'une position plus droite leur apportera plus de confort, notamment pour soulager la nuque et le dos. En réalité, c'est souvent le contraire qui se produit. Chercher une position avec un maximum de bascule et un minimum d'allonge permet un meilleur appui sur le cintre, soulageant d’autant la pression sur la selle. Combiné à une allonge adéquate cet appui sur le cintre soulage également les muscles lombaires en leur soustrayant la charge du haut de votre corps.
Le Rôle de l'Allonge
L'allonge, ou la distance entre le bec de selle et le cintre, est elle aussi, conjointement à la bascule, cruciale pour le confort à vélo. Une allonge trop grande empêche les bras de rester légèrement fléchis, obligeant le cycliste à creuser le dos, ce qui, en plus d'augmenter la pression sur le périnée, transfère le poids du haut du corps vers les lombaires et le fessier, entraînant des douleurs. De mon expérience c’est cette allonge qui est souvent trop élevée. Les bras du cyclistes sont alors tendus et ne "portent" plus grand chose du poids du cycliste. Ils tiennent simplement le guidon.
Avec une bascule adéquate et une allonge correcte, les bras peuvent porter une part significative du poids du haut du corps, soulageant ainsi les lombaires et le fessier. Un bon ajustement permet une posture où les bras fléchis amortissent les chocs et participent activement à la stabilité et au confort global. Les muscles cervicaux, eux, s'adaptent sans problèmes avec un peu d'entraînement (sous réserve de ne pas avoir de pathologies au niveau du dos et des cervicales).
Adaptation et Entraînement
Il est important de noter que bien que l'objectif théorique soit une bascule maximale et une allonge minimale pour des raisons mécaniques et physiques, chaque cycliste doit composer avec ses propres limites corporelles. Les blessures passées, la souplesse et d'autres facteurs personnels doivent être pris en compte pour trouver le compromis idéal.
Un certain entraînement et des ajustements progressifs sont souvent nécessaires pour que le corps s'adapte à une position plus couchée. Ce passage obligé est nécessaire pour obtenir un réel confort à vélo, mais c’est sûr qu’il se mérite ! C’est aussi ce qui fait la différence entre le cycliste et le bipède. Ou encore entre le cycliste et le randonneur à vélo. Et oui, le randonneur à vélo, droit comme un i sur sa selle rembourrée (oui je caricature un peu) peut faire le tour du monde, mais en y regardant de plus près, ils ne roulent que quelques heures par jour. Ce qui n’enlève rien à leur performance, mais personnellement, je ne les vois pas comme des "cyclistes" qui ont fait corps avec leur machine.
Il est vrai qu'une bascule "forte" est souvent associée aux cyclistes compétitifs, jeunes et en excellente condition physique. Cependant, chaque cycliste, quel que soit son âge, son niveau et son poids, doit rechercher le meilleur équilibre possible pour des raisons de... physique (je parle de celle qui définie les lois de la gravitation). La bascule maximale pour chaque individu peut ne pas être très forte, mais elle sera toujours bénéfique pour améliorer le confort et l'important est qu'elle soit maximale en fonction des conditions données (âge, souplesse, etc...). Les meilleurs cyclistes d'ultra-distance, comme ceux de la Transcontinentale, adoptent tous une position couchée avec une forte bascule. Ils pédalent plus de 15 heures par jour et reposent le haut de leur corps sur des prolongateurs pour soulager les poignets.
Le principe reste le même : répartir au mieux le poids. (Avant de s'intéresser à la section de vos pneus...)
En somme, la bascule est un élément souvent mal évalué par les cyclistes, qui pensent qu'une position plus droite est plus confortable. En réalité, une forte bascule et une allonge minimale permettent de mieux répartir le poids, soulageant ainsi le dos et le fessier. L’élément clé étant de faire les choses correctement en passant par une étude posturale qui vous aidera à dégrossir la zone de travail, analyser correctement les soucis, corriger chaque point de positionnement individuellement et collectivement. Cela prend un certain temps, mais c'est le meilleur investissement que vous pouvez faire pour rouler le plus longtemps possible...